LAOS : Paksé / Plateau des Bolovens / 4000 îles

Après une petite heure de vol nous arrivons à Paksé au Sud du Laos ; du hublot nous apercevons un géant bouddha doré posé sur une petite colline verdoyante. Créée au début du XXe siècle par les Français qui en avaient fait leur centre administratif du Sud et un point de contrôle de la navigation sur le Mékong, on croise à Paksé plus de locaux parlant français qu’au Vietnam. Crevées suite à une crève carabinée, nous prenons le temps de nous poser dans cette petite ville tranquille. Le 22 janvier les chinois et vietnamiens de la ville célèbrent le nouvel an chinois (Têt) qu’ils fêtent pendant trois jours à coups de pétards, feux d’artifice et musique. Dans le pays ils sont bouddhistes à 60% et une majorité de la population est animiste. La langue et la cuisine sont proches de celles de la Thaïlande. Le ventre encore un peu patraque par moments, je pars faire une analyse de sang dans une clinique de Paksé, autant dire chez une femme médecin qui a aménagé un espace "cabinet médical" dans sa maison... Lorsque nous entrons nous la sortons d’une sieste dans son hamac... le "cabinet" est assez roots, on se demande si on ne s’est pas trompé d’adresse... Pendant l’auscultation générale du corps elle me met l’otoscope qui pue le cérumen directement dans les narines... Pour la prise de sang elle m’emmène dans la salle d’attente (son salon) où tout le matériel est posé sur une petite table, l’endroit est tellement roots que je suis aux aguets quant à la seringue qu’elle va me sortir... Au bout d’un quart d’heure elle me ramène un petit boitier en plastique qu’elle me montre du doigt en me disant de son fort accent "il n’y a plus de bactéries dans votre sang", sur le coup je reste perplexe, je finis par comprendre que le boitier n’est autre qu’un test... Résultat de la visite : je suis entrée dans le cercle vicieux de la déshydratation... Maryline (pas non plus en forme) et moi buvons des litres de sachets de réhydratation (à base de glucose, sodium et potassium) qu’elle nous a filé, le lendemain nous pétons la forme... La situation sanitaire du pays est très précaire, il est d’ailleurs recommandé de se rendre en Thaïlande pour tout problème majeur. Le soir nous dînons sur la terrasse d’un restaurant offrant une vue panoramique sur la ville, sur la route nous croisons un jumbo (tuk tuk collectif composé de deux bancs de six places) transportant au moins une trentaine de personnes... plus on avance dans notre voyage, plus on voit des records de chargement, comme une moto transportant sept personnes !

Nous partons visiter le plateau des Bolovens, une des principales régions agricoles du Laos abritant des plantations d’hévéas (arbre à caoutchouc), tecks, thés, cafés, riz, bananes, letchis...
Nous alternons entre routes goudronnées et pistes, après la visite de plantations de café et de thé, nous arrivons à Tad Fan, plus hautes chutes d’eau du Laos se jetant dans une gorge vertigineuse de 200m de profondeur noyée dans une jungle luxuriante. Nous partons explorer le pseudo "sentier" avec un grec et une française, quelques mètres plus loin nous voyons un énorme arbre déraciné couché dans le vide, nous passons par-dessus la grosse motte de terre arrachée par ses puissantes racines. Le chemin est très escarpé ; tous les muscles de nos mollets, cuisses et bras sont sollicités, plus on avance plus le sentier penche vers le vide, nous nous accrochons à toutes les racines des arbres que nous rencontrons pour ne pas glisser. Tout à coup nous nous retrouvons face à un à-pic vertigineux, le sentier s’arrête net, le gouffre à nos pieds est impressionnant, mes jambes tremblent... Nous poursuivons par les magnifiques chutes de Tad Yuang auxquelles on accède par un escalier en bois intégré à la nature avec des branches d’arbre qui le traversent. L’endroit est splendide, nous descendons jusqu’aux pieds des chutes entourées d’une végétation luxuriante et dégageant un dense embrun. Après cette pause bucolique nous nous arrêtons dans un village d’ethnie Katou animiste, dont une des principales coutumes consiste à confectionner leurs cercueils de leur vivant, traditionnellement stockés sous les greniers à riz. Poules, cochons et marmailles nus ou aux fringues pourries déambulent dans ce petit village où le temps semble n’avoir aucune emprise sur ses habitants.

Suite à cette agréable journée nous quittons la province de Champassak pour nous rendre aux 4000 îles à l’extrême Sud du Laos. Cette région regorge de paysages sauvages et verdoyants, le Mékong se divise en une multitude de bras qui serpentent entre les îlots couverts de forêts tropicales humides, on y croise çà et là quelques villages qui vivent hors du temps... ce décor offre une belle occasion de découvrir des tranches de vies authentiques. Nous atterrissons dans une chouette guesthouse sur l’île de Don Khone, tenue par un couple de retraités laotiens dont la femme (Saysamone), fraichement revenue d’une séance de méditation à Paksé, nous fait goûter du riz rouge au lait de coco, cuit dans du bambou. Notre piaule surplombe le Mékong, nous offrant une belle vue sur le fleuve, l'île de Don Det et les montagnes alentours, nous savourons une bière locale sur notre terrasse devant un magnifique coucher de soleil, la vie est belle, je vis un pur instant de bonheur... A Don Khone le temps semble s’être arrêté, sans une voiture à l’horizon, l’île est tellement paisible et agréable qu’on sait quand on arrive mais jamais quand on en repart... nous repoussons le jour fatidique du départ à trois reprises... Un français travaillant dans une autre auberge nous raconte qu’il a eu une cliente américaine qui depuis le matin où elle devait quitter l’île, n’a pas arrêté pendant une semaine, tous les matins, la tête posée entre les mains et l’air contrariée, de lui dire "I’m not mentally prepared to leave today". On veut bien la coire... Le chant des oiseaux et des coqs rythme nos journées, ici il n’y a plus d’électricité à partir de 22h30. Nous louons des vélos pour aller vadrouiller dans l’île, nous croisons un gamin de 9 ans baladant ses potes à bord d'un tuk tuk, un autre d’à peine 10 ans aux commandes d’une pirogue transportant des passagers... Comme au Cambodge, on trouve au Laos des terrains de volley jusque dans les villages les plus reculés de la brousse. Nous partons découvrir Don Det, l’île d’en face, reliée à la notre par un pont de chemin de fer de 150m de long ; sur le chemin nous croisons une vieille dame aux dents et gencives bleues ; un petit garçon jette tant bien que mal un bout de bois contre un tamarinier pour essayer d’en récolter les fruits. Ici on voit beaucoup de palmiers à huile et la culture sur brûlis est monnaie courante. Au retour nous admirons un superbe coucher de soleil depuis le pont, c’est l’heure du bain dans le Mékong pour les marmailles, et des feux de bois s’allument çà et là pour la préparation du dîner. L’école primaire juste à côté de notre guesthouse arbore une clôture en rails provenant de l’ancien chemin de fer ; l’instituteur y sonne la cloche à l’aide d’un bout de fer contre une rambarde en métal.

Nous prenons un apéro en live avec Béné et Elise sur skype, au retour du resto Maryline se casse la figure dans la salle de bains dont le carrelage était trempé par ma douche. Le lendemain Saysamone vient frapper à notre porte pour passer une pommade verdâtre sur le coude de Maryline, plus tard elle nous offre un petit goûter composé de biscuits et de fines lamelles de coco. La semaine ses petits enfants (de 6, 8 et 10 ans) ont la vie dure, ils vont à l’école d’à côté, rentrent déjeuner en vitesse et travaillent à l’auberge entre midi et deux, puis retournent à l’école l’après-midi et se remettent à travailler à l’auberge en rentrant, quant aux weekends ils travaillent également à servir les repas, changer les draps et encaisser les visiteurs... Nous partons en bateau voir les chutes de Pa Peng, surnommées les "Niagara du Mékong" car plus grandes chutes d'Asie du Sud Est. La puissance de l'eau est impressionnante, nous remarquons des petites passerelles construites par les pêcheurs locaux avec des fines branches d’arbres, ainsi que des cabanes de fortune où ils vivent. Le lendemain nous partons à vélo aux chutes de Liphi, signifiant en lao "le gouffre du fantôme" car à l’endroit où elles tombent se forme un cul-de-sac sans courant qui retient les épaves. Il fait une chaleur d’enfer, nous continuons notre visite sur l’île jusqu’au petit village de Ban Hang Khone, ancien embarcadère d’où nous profitons d’un panorama sur le Mékong, à la frontière du Cambodge. Dans le coin on peut observer des dauphins d’eau douce (Irrawady), espèce qui ne compte plus que quelques dizaines de spécimens dans le monde. Nous rencontrons une jeune française rousse aux yeux bleus, roots et un brin fofolle. Nous rentrons ensemble à vélo à la recherche d’un son reggae que nous avions entendu à l’aller dans un village enfoncé dans la jungle; nous entamons la soirée sur l’île voisine dans les hamacs de la guesthouse de Nathalie, par un apéro très jovial. Après ce chouette début de soirée, nous rentrons de nuit avec une lampe torche pour deux vélos sur une fine piste bordant le Mékong. Le lendemain nous pédalons jusqu’aux chutes de Pa Soi, nous traversons un petit pont suspendu duquel nous voyons plein de petits poissons gris argenté sécher au soleil sur des rochers en contrebas, et des paniers en entonnoir fabriqués avec des lianes, du bambou et de la ficelle, et placés dans des passages étroits entre les gros rochers de la rivière pour capturer les poissons. Au moment où je vous écris nous savourons notre dernier coucher de soleil sur cette île charmante et paisible, à siroter une bière, posées sur des matelas et coussins triangulaires thaïlandais d’un petit resto en bois surplombant le Mékong. La serveuse a les dents et gencives rouge sombre. Aujourd’hui nous entamons une longue route jusqu’à Thakhek situé un peu plus au centre.

Comments

[MalouineRigourd]

on tombe par hasard sur le mot Laos, et on ne peut s'arrêter de lire votre périple; on s'y croit
merci pour ce voyage virtuel!

[Regard'ailleurs]

Bonjour Malouine, merci pour ton message très flatteur... Si par hasard tu dois voyager un jour dans un des pays où on est allé, n'hésites pas à nous contacter pour des infos... Belle journée à
toi =)

[Annie]

Bonjour
Comme toujours j'attendais de vos nouvelles . Malgré quelques ennuis de santé je vois que vous avez récupéré,prenez bien soin de vous quand même car les séjours à l'hosto dans ces pays ??????
Ca doit être agréable pour vous de rencontrer de gens parlant français
même si votre but est d'être plongé dans l'authenticité des pays.
Vous allez avoir du mal à revenir à la réalite française et la vie de tous les jours , profitez donc de votre paranthèse asiatique qui peut-être va vous donner l'envie (quand vous aurez refait une
confortable cagnotte) de préparer un autre voyage exotique
Je vous embrasse chaleureusement malgré la température extérieur de ce matin - 7 sur ma terrasse mais avec un beau soleil
A bientôt
Annie

[Regard'ailleurs]

Salut Annie, il est clair qu’on va avoir du mal au retour… et qu’il faudra se réadapter au train train français… mais on verra ça plus tard ;) Pour ma part c’est le 2ème long voyage que
j’entreprends et je ne compte pas m’arrêter là… c’est une drogue… Et on dirai bien que Maryline y a pris goût aussi ;) On t’envoie les degrés suffisant pour dégeler ta piscine ;) Chaudes bises.